Édition canadienne 2024 : Rapprocher les cultures

Tanya Tagaq, une artiste multidisciplinaire inuite d’Ikaluktutiak (Cambridge Bay, Nunavut), élargit son répertoire créatif avec Il vaut la peine de le répéter (Tundra), son prochain livre de comptage destiné aux jeunes lecteurs, écrit en inuk et en anglais et illustré par Cee Pootoogook.

Tagaq est surtout connue pour ses compositions musicales avant-gardistes mettant en vedette le chant de gorge, qui lui ont valu le Prix de musique Polaris et plusieurs prix Juno, ainsi que pour son premier roman de 2018, Dent fenduel’histoire semi-autobiographique d’une jeune fille inuite qui grandit dans une petite ville de l’Arctique et qui doit faire face à une grossesse inattendue. Le livre a été sélectionné pour le prix Scotiabank Giller et a remporté le prix Indigenous Voices pour la prose publiée en anglais.

Dans ses débuts pour enfants, Tagaq explore des territoires plus doux tout en restant fidèle à ses racines. « Une grande partie de ma musique et de mon travail sont assez intenses et très adultes », explique-t-elle. « J’ai réalisé que je n’avais jamais exprimé cette facette de moi : la joie absolue des enfants et la façon dont ils illuminent la vie de chacun. »

Le livre de comptage représente une procession d’ours polaires qui partent à la chasse pour déjeuner dans un trou dans la glace, et son objectif est plus que d’apprendre aux enfants à compter. « C’est une façon de faire découvrir aux jeunes lecteurs la culture inuite », explique Tagaq, « en mettant en valeur la langue inuktitut ainsi que la beauté austère de l’environnement arctique. » Le livre aborde également les thèmes de la souveraineté alimentaire et du cycle naturel de la vie dans l’Arctique, présentés de manière accessible aux jeunes lecteurs. « Les Inuits sont très proches de la terre et nous savons exactement d’où viennent nos hamburgers. »

Le concept initial de Il vaut la peine de le répéter provenait d’une source inattendue. «J’écoutais la chanson des White Stripes ‘Fell in Love with a Girl’, dont le refrain contient la phrase ‘ça vaut la peine de le répéter’», raconte Tagaq. «J’ai réfléchi à cette phrase et au fait que, oui, ce sont des choses qui devraient être répétées encore et encore. Mais j’ai aussi pensé aux saisons et à la façon dont les ours polaires viennent chaque année à la même heure.

Pour rester fidèle à sa vision, Tagaq a travaillé en étroite collaboration avec ses éditeurs pour sélectionner un illustrateur inuit pour le projet. Pootoogook est quelqu’un que Tagaq admire depuis longtemps. « Ce fut un moment très émouvant lorsque j’ai découvert qu’elle participerait », dit-elle. Elle aime la façon dont les illustrations s’inspirent des sculptures inuites et renforcent davantage le contexte culturel du livre.

Alors que Il vaut la peine de le répéter s’adresse aux jeunes enfants, Tagaq a superposé au texte des significations plus profondes qui trouveront un écho auprès des adultes. Elle espère que cela contribuera à combler les écarts culturels et à favoriser la compréhension de la vie des Inuits. « Nous vivons de l’autre côté de l’océan Arctique, et l’océan gèle profondément en hiver », explique Tagaq. « Vous pouvez même y conduire un camion. Pendant plusieurs mois de l’année, il n’y a aucune végétation. Tout est de la glace. Nous avons donc appris à vivre sans arbres ni végétation, en travaillant avec les animaux et en les chassant.

Tagaq espère également Il vaut la peine de le répéter aidera les enfants à apprendre à s’exprimer dans une langue qui n’est pas la leur. « J’adore l’idée de petites bouches faisant les sons d’Inuk », dit-elle.

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Une version de cet article est parue dans le numéro du 30/09/2024 de Éditeurs hebdomadaire sous le titre : Rapprocher les cultures